Foggy

Picture
Pour cet article, j’ai choisi un joueur un peu plus contemporain. Un joueur dont les plus jeunes verront probablement seulement le nom sur des listes de flops de repêchages aux côtés d’autres tels Alexandre Daigle et Patrik Stefan. Pourtant, le joueur dont il est question est possiblement l’un des joueurs les plus talentueux à avoir enfilé les patins dans un pays qui a fait du hockey son sport national.

Le plus jeune d’une famille de 5 enfants, Bryan Fogarty grandit et joue son hockey amateur dans la municipalité de Brantford en Ontario. Il est d’un naturel évident et se démarque immédiatement. Bob Coyne, coordonnateur du hockey mineur de Brantford à cette époque racontera :

Dès le jour 1, tout le monde savait. Il était une étoile. Dès le moment où il a enfilé une paire de patins, il était meilleur que quiconque. Nous avions vu Wayne. Wayne devait y mettre des efforts. Son jeu consistait à déjouer les autres en se montrant plus malin qu’eux. Le jeu de Fogarty était de performer à un niveau au-dessus de ce que tous les autres étaient en mesure d’offrir.

Son grand talent fit qu’il évolua dès son adolescence avec des coéquipiers plus âgés que lui. Dès l’âge de 15 ans, il consomme régulièrement de l’alcool dans les bars et clubs de danseuses, où il se rend généralement avec des coéquipiers. Il est repêché au tout premier rang en 1985 par les Canadiens de Kingston de la Ligue de hockey junior de l’Ontario. Adam Graves et Brendan Shanahan sont sélectionnés plus tard la même année. Les recruteurs juniors n’avaient que de bons mots pour ce défenseur à caractère offensif doté d’un sens inné du hockey. Ses habiletés combinées à une stature imposante pour l’époque, Fogarty deviendra une supervedette de la OHL, en s’alignant pour le Thunder de Niagara Falls. Il fut considéré par certains comme le futur Bobby Orr. Une comparaison plus réaliste était cependant plus souvent faite avec Paul Coffey. Et pour juste cause.

De nature insécure et anxieuse, il craint toujours de ne pas être apprécié de ses coéquipiers. Il est aussi terrifié de la critique. Le fait de boire de l’alcool apaise cette anxiété et il consomme de plus en plus. Il sera plus tard su que Fogarty souffrait d’anxiété sociale, maladie dont sa mère souffrait également. Il est aussi connu que l’alcool permet de soulager l’anxiété lorsque la maladie en est à ses débuts, mais qu’elle en devient par la suite un facteur aggravant.

Éligible au repêchage en 1987, il est courtisé par plusieurs équipes. Un dépisteur des Red Wings avouera en entrevue bien plus tard que l’organisation avait invité Fogarty pour un repas au restaurant, question de savoir quel type de jeune homme il était. Il mentionne :

J’ai su après 10 minutes que nous ne repêcherions pas ce jeune. Il frappait compulsivement sa fourchette contre la table. Il était de nature très nerveuse.

Maurice Fillion le repêche au 9e rang lors de la 1ère ronde du repêchage de 1987. Le deuxième choix des Nordiques lors de cette 1ère ronde est Joe Sakic. Maurice Fillion :

Il avait tout pour lui. Il patinait comme le vent. Il pouvait voir n’importe qui sur la glace. Il pouvait faire la passe parfaite. Il était aussi talentueux que tous les joueurs juniors que j’ai vus. Il a brisé les records de Bobby Orr. Tout le monde me disait tu ne peux te tromper avec lui.

C’est en 1989, alors qu’il est proclamé joueur junior de l’année au Canada, que Fogarty connaît une saison comme on en voit peu et établit plusieurs records pour un défenseur au niveau junior canadien. La majorité tient d’ailleurs toujours. Durant cette saison où il joue 60 matchs, il enfile 47 buts, fracassant ainsi la marque de 38 en une saison détenue par deux inconnus, Bobby Orr et Al MacInnis. Il ajoute 108 mentions d’aide, effaçant ainsi la marque de 96 établit une décennie plutôt, pour totaliser 155 points. Le record précédent de la Ligue de l’Ontario était de 123 points, détenu une fois de plus par un pied de céleri, Denis Potvin. Il établit aussi une nouvelle marque au niveau canadien effaçant l’ancien record qui était de 140 points en une saison.

Son alcoolisme grandissant rend les débuts de Fogarty difficiles dans la Ligue nationale. Durant les 4 saisons qu’il passera dans l’organisation des Nordiques, ces derniers tenteront de l’aider de plusieurs manières. Il se verra offrir les services d’un thérapeute, ira en cure au Minnesota. Il se liera d’amitié avec John Kordic, un coéquipier luttant alors avec ses propres démons. Durant une période de sobriété commune, ils seront co-chambreurs et Kordic supportera Fogarty dans son combat contre l’alcool. Au début de 1992, Kordic recommence à consommer et décède cette même année. Fogarty se culpabilise de cette rechute et de ce décès et recommence à consommer lui aussi. Après avoir échoué au hockey, il avait échoué à l’amitié semblait-il croire.

Fogarty est échangé à Pittsburg quelques mois avant la mort de Kordic. Québec obtient Scott Young en retour de ses services. Son séjour à Québec n’aura pas été à la hauteur des espérances. Il demeure toutefois le 1er défenseur de l’organisation à avoir inscrit un tour du chapeau et le dernier de l’histoire des Nordiques à en avoir inscrit un naturel (sans filet désert).

Il ne jouera que 12 parties à Pittsburg pour être par la suite échangé à Chicago. Il s’alignera ensuite successivement avec Tampa Bay, Montréal, Buffalo et de nouveau Chicago. Il jouera aussi sa part de matchs dans les rangs mineurs. Lorsqu’il met un terme à sa carrière en 2001, Fogarty a connu une carrière professionnelle de 9 saisons, où il a évolué au sein de 17 équipes, dans 7 ligues différentes. Les dernières parties qu’il aura jouées dans la LNH auront été pour le Canadien de Mtl.

Malgré tout, ces statistiques cumulatives témoignent d’un talent certain. Il aura cumulé 74 points en seulement 156 parties dans la LNH.

Fogarty restera sobre pendant plus d’une année après la prise de sa retraite. Alors qu’il est en vacances à Myrtle Beach pour y faire de la plongée en 2002, il passe une journée au bar de l’hôtel avec un oncle de sa conjointe et y consomme beaucoup d’alcool. Il monte à sa chambre se coucher en fin de journée. Fogarty ne se réveille pas le lendemain et ne sera pas réanimé. Son décès est constaté le 6 mars 2002, des suites d’un arrêt cardiaque. Il repose en paix au cimetière Holy Cross de Brantford.

Auteur : jaywheel 2010-11-23
http://www.connexionhck.com/viewtopic.php?f=79&t=4899